campagne “J’agis mais je ne suis pas dupe”

 

“Pour changer la société, nous devons être des millions, pas une poignée de radicaux “- Cyril Dion.

En bref

C’est à vous, conscient de l’état catastrophique de la terre et pessimiste quant à son avenir, que s’adresse en priorité cet appel à s’activer à sa restauration. L’ antidote psychologique à une potentielle désespérance revient à s’illusionner volontairement sur l’efficacité de vos engagements personnels, alors que vous n’y croyez plus du tout, convaincu que c’est un combat perdu d’avance.  Tant de domaines sont ravagés, certains déjà irrémédiablement, de nombreux autres sur le point de l’être , qu’un découragement légitime vous envahit et que les petits gestes individuels, façon colibri, qu’on vous incite à poser semblent dérisoires et même insignifiants face au défi gigantesque pour ne pas dire surhumain à relever . 

  Le pessimisme de la lucidité n’annihile pour autant une activation de la volonté.

 Agir quand même sans cependant être dupe du jeu des décideurs politques, économiques et financiers, soutenus par une large majorité des nantis, qui consiste à nous encourager à  multiplier les initiatives citoyennes et  abuser de notre crédulité pour continuer à pratiquer l’attentisme ou le greenwashing et ainsi ne pas prendre les indispensables mesures radicales et contraignantes, les seules susceptibles de sauver ce qui peut encore l’être, s’il n’est pas déjà trop tard, . Mesures toujours repoussées ou atténuées, sauf dans leurs discours  mensongers,  car contraires à leurs intérêts et privilèges.

 En faisant comme si votre action pouvait changer les choses vous adhérez au mouvement virtuel des illusionnés volontaires sans promesses, sans meneur providentiel, sans conviction de réussite, mais avec, pour contrebalancer ce vide directif, le plein de doute assorti d’autonomie, de créativité et de dynamisme en quête du Graal de la Vérité (si elle existe!).

 Quant à vous, déjà engagé par conviction positive,  participer à cette campagne n’implique nullement un changement d’opinion, ( continuez de croire à une très  hypothétique résilience), mais met en évidence votre  lucidité  à encourager la mobilisation la plus large possible des “conscientoyens”, afin de réunir une masse vertueuse assez étoffée ( je n’y crois pas, mais rien n’interdit d’essayer) pour forcer nos dirigeants à considérer le dérèglement climatique comme la priorité des priorités: la survie de l’humanité en depend, et à agir en conséquence.

Concrètement invitation est lancée à tous les “conscientoyens” d’imprimer au  format choisi la photo ci-dessous, de l’afficher partout où c’est possible, de relayer le message de telle sorte que la visibilité multipliée de l’affiche agisse comme un rappel permanent de notre responsabilité citoyenne et surtout celle primordiale de nos dirigeants.

Argumentation développée 

Les irresponsables 

 Nous nous comportons comme un conducteur de voiture inconscient qui, dans la nuit noire, tous phares éteints, incapable de voir un éventuel obstacle, plutôt que d’avoir la précaution de ralentir, au contraire accélère, se mettant en danger de mort ainsi que ses passagers. De même nous allons tout droit dans la barbarie torturante d’un survivivalisme de plus en plus violent au fur et à mesure de l’amenuisement drastique des ressources, qui à terme aboutira à l’anéantissement du vivant, victime d’un capitalisme dévastateur. Il aurait fallu depuis longtemps, pour atténuer ses effets pervers, y substituer un capitalisme à visage humain (?) ( expression généralement accolée au communisme dont les tentatives pour y arriver ont été étouffées dans l’oeuf par la Russie et les États-Unis dans leur zone d”influence respective), comme à Venise du temps de la splendeur des doges, certes capitaliste, mais soucieuse du bien public avec des salaires élevés, des prêts limités à 5% maximum , la richesse partagée, l’évasion fiscale inexistante¹.

 Presque tous les scientifiques spécialistes du climat nous donnent tout au plus 10 à 20 ans pour réagir énergiquement, après ce sera trop tard. Comment peut-on imaginer qu’un tel bouleversement puisse avoir lieu en si peu de temps, alors que responsables à 99% du désastre écologique, les pays nantis continuent à vivre comme si de rien n’était: surproduction, surconsommation ( de plus en plus grands, les cargots porte-conteneurs sont toujours pleins à rabord), gaspillage, déplacements, voyages, tourisme, etc et à voter pour des gouvernements qui entretiennent cet état d’esprit de permissivité débridée, à peine tempéré par très peu d’interdits ou d’obligations et beaucoup d’incitations, non contraignantes, à poser des gestes respectueux de l’environnement. qui ne changeront pas en profondeur un système économique, avec en tête les multinationales² ses plus “dignes” représentants, qu’ils veulent sauvegarder â tout prix, même au détriment de l’écologie. Écologie que des politiques climatosceptiques -Trump ,Bolsonaro entre autres- piétinent ouvertement, ce qui ne les empêche pas d’être élus et même d’être à 2 doigts de leur réélection malgré un bilan écologique catastrophique.

 Dans le même ordre d’idées mais dans une moindre mesure, stigmatisons d’autres comportements coupables de ne pas accorder la priorité absolue et urgente à la transition climatique³. Comme celui du technocrate économiste Emmanuel Macron qui, fort de 15 conseillers privés mis à sa disposition, en a affecté 5 à la communication et 1 seul à l’écologie⁴, favorise les chasseurs au profit de son intérêt électoraliste au détriment de la biodiversité des espèces animales, félicite les forces de l’ordre usant de violences mutilantes à l’encontre de protecteurs de la nature qui s’opposent à des megaprojets destructeurs de l’environnement, dissout la convention citoyenne chargée de présenter des propositions écologiques de changement qu’il avait promis d’appliquer à la lettre. D’ailleurs Nicolas Hulot ne s’y est pas trompé en démissionnant de son poste de ministre, ne voulant plus servir de caution flamboyante à l’opportuniste chef d’État⁵. Coutumier de fausses promesses et malgré un bilan en matière d’écologie assez calamiteux, Macron a cependant été réélu. Preuve une fois de plus de l’indifférence de la majorité des citoyens à l’égard de la crise actuelle.

 Dans ce contexte, il est inenvisageable de prétendre passer de l’intempérance à la modération, de la compulsion boulimique à la sobriété, de la dépendance aliénante à l’autonomie libératrice, de la compétition neo-libérale destructrice à la convivialité constructive⁶, de l’accaparement personnel des richesses à une redistribution solidaire, de la croissance matérielle, toujours l’indice obsessionnel de référence économique des gouvernements qui y croient comme dans un acte de foi⁷, à la croissance ordonnée aux nécessités des plus pauvres, combinée chez les riches à une décroissance vers le seuil d’une frugalité joyeuse  ou, tout au moins, à une acroissance satisfaisante. Comment en effet conscientiser à ce renversement des valeurs? ” La conscience est la dernière et la plus tardive évolution de la vie organique, et par conséquence ce qu’il y a de moins accompli et de plus fragile en elle”⁸.Tâche d’autant plus ardue qu’il est question ici de ce qui pourrait apparaître comme une régression, même pour un bien supérieur. Peut-être que dans notre héritage intergénérationnel, l’empreinte mémorielle des siècles de privations pour enfin trouver l’abondance légitime inconsciemment ces envies pléthoriques que “dopamine” la zone du plaisir du cerveau, le striatum qui nous gouverne depuis des millions d’années pour assurer la survie physique de notre espèce, même au prix de la destruction de la biosphère, en opposition avec le cortex, siège de la réflexion et de la raison⁹

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 La conscientisaton aurait pu émerger du rayonnement éducatif indirect des exemples réussis des initiatives citoyennes et de ” l’économie communaliste”¹⁰ à haute valeur sociale et démocratique, qui n’est ni communiste, ni communautariste et qui concerne, pêle-mêle et parmi bien d’autres, les systèmes d’échange local, les coopératives de petite, moyenne ou même de de grande taille ( comme celle de Mondragon en Espagne), les groupes d’achat en commun, les associations pour le maintien d’une agriculture paysanne, le commerce équitable, etc. Ces démarches dont l’ampleur s’accroît peu à peu restent encore trop marginales pour détourner les esprits du système actuel dispendieux qui en plus les ravit.

 La seule possibilité d’une métamorphose complète réside malheureusement dans des catastrophes “naturelles(?)”: sècheresse, montée des eaux, disparition des polinisateurs, raréfaction de l’eau potable, stérilisation des sols, qui compromettraient de façon irréversible la vie sur terre, ou dans des désastres spécifiquement humains : guerre ou embargo comme celui qui frappe Cuba depuis plus d’un demi-siècle et qui a obligé les cubains à faire preuve d’une inventivité toujours en éveil et d’une autonomie sans faille: tout est récupéré, réparé, recyclé, démonté et mis en réserve. Ils fabriquent du matériel (des ordinateurs, des smartphones et même un internet local) à partir des pièces détachées existantes complétées par des apports réalisés en 3D; ils produisent du gaz et de l’électricité par biométhanisation des déchets; ils développent exclusivement en biologie agriculture, maraîchage, élevage; potagers individuels et collectifs généralisés…. ( Voir le documentaire sur un sujet insuffisamment abordé et pourtant si riche de découvertes informatives :” Cuba, voyage dans une nation light-tech”). Pourquoi si peu de publicité pour une réussite aussi exemplaire? Poser la question, c’est y répondre.

Doute et Illusion nécessaires.

Pourquoi lancer une campagne d’affichage et de sensibilisation, pour le moins dérisoire, alors que notre sort funeste semble scellé inéluctablement ?

 “La destinée naturelle de toutes les civilisations est de grandir et de dégénérer , et de s’évanouir en poussière”¹². Constat historiquement avéré et potentiellement démobilisateur par son côté fataliste sauf si on s’attache au contrôle strict et à la mise en oeuvre efficace des moyens pour repousser l’échéance la plus éloignée possible, comme on le fait pour nous-mêmes. Du fait qu’actuellement on est très loin du compte, l’objet de ma modeste campagne d’affichage vise à mobiliser les consciences dans ce sens.

 Le pire est fort probable mais pas certain. Place donc au doute, aussi infime et négligeable soit-il comme ici, qui devrait nous tarauder dans le cas des grandes orientations de vie collective à adopter. Relevant de la nature  humaine fantasque et imprévisible, celles-ci peuvent prendre des directions aussi bien étrangères à l’entendement que conformes à la raisonnabilité.

 Par un tour de passe-passe dont le cerveau a le secret, l’illusion consciente vient au secours des esprits clairvoyants envahis par le doute sous la forme d’un soutien verbal émancipateur qui passe par la formule magique “faire comme si” et le tour est joué. Elle occulte les freins, les manques, les insuffisances pour illuminer les leviers, les forces, les énergies et devient dans nombre de situations potentiellement positives le sésame d’un possible épris de liberté et d’une prise engageante sur un réel valorisé. L’illusion nécessaire pour ombrer notre impuissance face au destin et accréditer l’hypothèse d’une échappatoire dans des initiatives citoyennes aux côtés des convaincus, des utopistes et des adeptes de la méthode Coué, malgré la conviction intime (au contraire de la leur) que tout est perdu, que le combat est trop inégal, que ça ne sert à rien de lutter, sauf erreur. 

 Vous le désabusé des nobles causes à “la conscience malheureuse”¹³, ne vous confinez pas dans un attentisme ou une passivité qui favorise les forces maîtresses du jeu, laissez-vous gagner par le doute actif que la réalité des faits étalés dans la durée métamorphosera peut-être en certitude positive à faire prospérer ou négative à combattre, illusionnez-vous sur l’efficacité de votre soutien aux associations, entreprises, mouvements qui prônent des valeurs humanistes et écologiques. Cependant pas de confiance aveugle, ni de chèque en blanc. Une vigilance toujours en éveil, une activation permanente de votre contre-pouvoir qui expertise la concrétisation des principes de base et en cas d’avancées probantes, ouvre la voie à un engagement inconditionnel dans l’oubli du scepticisme initial.

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1) J-Cl.Barreau “Venise, un capitalisme à visage humain”. Titre accrocheur mais trompeur, car le système capitaliste, qui cherche avant tout à maximiser ses profits grâce à l’exploitation éhontée des ressources et des hommes et à l’aliénation consumériste, est prédateur nuisible et anti-nature,même sous des apparences humanisantes comme dans la parenthèse historique progressiste de Venise ou dans notre social-démocratie actuelle.

2) André Gorz “Écologie et liberté”. Déjà dans les années 70, il avait prédit qu’au XXI ème siècle plus ou moins 200 groupes économiques et financiers dirigeraient le monde. On y est.

3) Désobéissance Écolo Paris ” Écologie sans transition”. Pour ce collectif, l’idée de transition nous égare, nous ne pourrons pas faire l’économie d’une rupture brutale et complète.  Dans ” Désobéir pour la Terre”, Dominique Bourg met aussi en avant la désobéissance civile non violente, au contraire du géographe suédois A.Malm ” Comment saboter un pipeline” qui dénonce le pacifisme des écolos et prône l’insurrection climatique.

4) Nathanaël wallenhorst ” Qui sauvera la planète ?”. Réponse : personne. Dans son implacable et déprimant  constat, aucun gouvernement, qu’il soit démocratique, technocratique, autocratique ou autre, ne cherche à le faire. Après la démonstration quasi exhaustive de la situation insoluble actuelle, son dernier chapitre conclut par sa foi en l’avenir (?) notamment par le biais des jeunes éduqués surtout à l’école ( leurre que cette conviction, eu égard à ses programmes obsolètes et sa déconnexion avec le vécu et intérêts des élèves). 

5) Nicolas Hulot ” Ne plus me mentir”.

6) “Manifeste convivialiste” (2013) et”Second Manifeste convivialiste” (2020). Pour un partage des ressources et le primat de la coexistence.

7) Christian Blanc ” La Croissance ou le Chaos”. Encore un politique inconscient.

8) Fr. Nietzsche  ” Le Gai Savoir”. Recherche d’une science critique détachée de toute croyance.

9) Sébastien Bohler ” Le bug humain”. Conforte la conviction déterministe par de nombreuses preuves scientifiques, contredites cependant par certains confrères.

10) Christian Arnsperger ” Éthique de l’existence post-capitaliste”. Projet d’une enthousiasmante utopie réaliste d’existence post-capitaliste et des “outils spirituels” nécessaires à l’auto-transformation de notre conscience en vue d’adhérer au changement.

12) Alexis Carrel.

13) Hegel.

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